Comme une petite scène sur la petite scène du théâtre du Rond-Point, des rideaux blancs laissent à peine entrevoir un espace minuscule et encombré où semble vivre un homme…
L’acteur (metteur en scène, auteur) belge, David Murgia, surgit et nous ouvre les rideaux sur le monde des invisibles, des déclassés, oubliés, même pas vus. Après Discours à la Nation en 2013 et Laïka en 2018, la pièce Pueblo écrite et mise en scène par Asciano Celestini met en lumière l’histoire intime et les rêves de ces anonymes pour leur redonner une humanité niée par la société. Nulle colère, nulle plainte dans ce long poème à vif qui ne s’essouffle jamais, accompagné en direct par la douceur musicale de l’accordéon et du piano synthétique de Philippe Orivel. Ces récits sont le fruit d’un travail de recherches sur le terrain et d’enquêtes sur la réalité et l’imaginaire collectif de notre époque. Ils redonnent vie à des laissés-pour-compte travaillant dans un entrepôt, un supermarché ou vivant sur un parking. Ici, dehors, une clocharde refuse de faire la manche, un gitan de huit ans fume sous la pluie. Là-bas, une caissière se rêve en reine et le devient, une tenancière de bar surveille ses machines à sous. David Murgia, narrateur empathique et flamboyant dans son récit ininterrompu entre la scène et le public, projette comme un vidéoprojecteur les images de ces vies re-racontées.
« C’est un théâtre qui joue avec nos représentations du monde et des gens qui le peuplent, un théâtre qui réhabilite les notions de classes, d’inégalités sociales, de déshumanisation. Un théâtre qui s’engage dans le monde, dans les règles de l’art, comme le ferait la littérature ou la peinture. Car, en effet, ceci est de l’art. »
David Murgia
Frédérique Pierson
Pueblo de Ascanio Celestini, avec David Murgia, Théâtre du Rond-Point, Paris
11 au 23 Octobre 2022
Photo © Céline Chariot, 2020