Illustration © Pere Farre

Tribu
de Nathalie Yot

La petite musique du danger

Elvire est une violoncelliste d’exception, capable de fasciner son auditoire par la qualité et la force de son jeu quand elle est en solo, et d’entrainer tout le monde lorsqu’elle joue avec d’autres violoncellistes dans un orchestre. Elle travaille énormément, améliore son exécution, vise la perfection et sans doute y arrive-t-elle. Elle vit avec Yann, qui est insouciant et inconstant, qui ne travaille pas vraiment et ils s’aiment à la folie.

Le couple rencontre à une terrasse de café Mina, d’origine marocaine, qui fait des ménages, qui les trouve adorables, tellement loin de ce qu’elle vit. Le trio improbable sympathise et alors qu’Elvire doit partir pour quelques mois rejoindre l’orchestre de Rouen, elle confie Yann à Mina, parce qu’il va avoir du mal à supporter son absence.

Ce roman est écrit dans une langue très belle et épurée, avec un mélange de simplicité, de précision, de contre-pieds, cette écriture permet d’instiller l’air de rien le contrepoint de l’excellence d’Elvire, un fantasme terrible et fou qui va faire basculer le roman dans une noirceur étonnante.

Alors qu’Elvire poursuit sa carrière à Rouen, bouleversant là-bas aussi les équilibres de l’orchestre, cette petite phalange de musiciens presque militarisés, Yann et Mina vont cohabiter dans une ambiance violente, à la limite des tabous, de l’insupportable, au péril de leur vie. On prie pour qu’Elvire revienne, tel un archange justicier, pour mettre fin à cette folie, pour chasser les ténèbres qu’elle a créées sans le vouloir. Mais en est-elle capable ?

C’est un roman magnifique, avec des personnages marquants, surtout Elvire qu’on aimerait connaître, qu’on suit passionnément, même si elle fait peur. C’est un roman un peu dérangeant, malaisant, très beau, à lire bien sûr !

François Muratet

Tribu, de Nathalie Yot, Editions La Contre Allée, 2022

Illustration © Pere Farre