Joël Pommerat, le théâtre comme absolu. Un documentaire de Blandine Armand
A 19 ans, Joël Pommerat veut être comédien, à 23, sa vocation se précise, il opte pour l’écriture, à 27, il décide de mettre en scène ses textes. Aujourd’hui il est devenu un auteur et metteur en scène de théâtre majeur, un raconteur d’histoires. Il approfondit spectacle après spectacle son œuvre avec sa fidèle compagnie Louis Brouillard. Le documentaire de Blandine Armand retrace l’univers de cet auteur qui occupe une place particulière sur la scène dramatique française.
Pour Joël Pommerat, le théâtre est un « chemin de connaissance » de notre monde contemporain, depuis les cercles du pouvoir économique et politique, en passant par l’aristocratie ou les ordres religieux, jusqu’aux différentes composantes de la classe moyenne, des cadres aux travailleurs indépendants ou précaires.
Il a également réécrit des contes populaires : Le Petit Chaperon rouge, Pinocchio (2008) et Cendrillon (2011). « Les contes, dit-il, relèvent d’un parti-pris d’écriture que j’ai adopté depuis longtemps, qui consiste à chercher à décrire des faits fictionnels comme s’ils étaient réels. En cherchant une forme de description la plus simple et la plus directe possible. Comme le conte décrit des relations humaines fondamentales, il ne peut pas échapper à la famille. »* La scène est pour lui un espace de recherche à partir des improvisations des comédiens. Le processus d’écriture est itératif, chaque répétition peut modifier la version précédente réécrite par l’auteur. Chez lui, textes, lumières, sons, musiques et costumes s’élaborent quasiment dans le même temps, sur le plateau en collaboration avec l’équipe artistique. Ce théâtre intégral qui ne cloisonne pas est unique. Eric Soyer, scénographe et compagnon de toujours de l’auteur, déclare dans le film de Blandine Armand : « Ce qui m’a toujours fasciné dans son écriture, c’est le point de glissement entre la banalité et le monde de l’inconscient. » Deux procédés déconstruisent le travail classique du comédien. Chaque nouvelle image apparaît après une transition au noir comme un tableau vivant surgi de la pénombre, les postures chorégraphiques des comédiens ponctuent le texte. Autre procédé donnant l’impression d’une hyperréalité fantastique, le décalage à certains moments entre le son et l’image grâce à des voix amplifiées, des narrations, un peu comme au cinéma.
La trentaine de pièces de l’auteur sont traduites en quarante langues et tournent dans le monde entier. De nombreux extraits de son répertoire émaillent le film, qu’il s’agisse de Cendrillon, d’Au monde, des Marchands, et de Ça ira (1) Fin de Louis.
Sylvie Boursier
Photo de Joël Pommerat © David Balicki
* juillet 2011, entretien avec Christian Longchamp, réalisé pour le magazine de la Monnaie|DeMunt
Joël Pommerat, la passion du théâtre, captation gratuite jusqu’au 19 septembre 2020 sur culture box https://www.theatre-